PORTRAIT DE TRANS’ « JAMES » :
Dès que j’ai su qu’il fallait que je fasse une hormono-thérapie, que c’était comme ça que je voyais ma vie, pour me rendre plus heureux, il n’y a rien qui m’a freiné. J’ai fait toutes les démarches que je devais faire, j’ai fais mes coming out, j’ai dis à tout le monde ce qui allait se passer, et je leur ai dit ‘Ben si vous ne m’acceptez pas, c’est too bad pour vous. Parce que moi, c’est comme ça que je vois ma vie, je suis désolé, mais c’est ça.’
Rien ne m’a freiné mis à part le fait que la testostérone peut être dangereuse pour le cœur et le foie.Là j’ai eu un questionnement : je vais peut être me faire mal, il faut que je prenne le plus de précautions possible pour ne pas me faire mal. Mais même à ça, quand t’es au pied du mur et que t’as l’option de faire, c’est mieux de le faire et peut être avoir des problèmes, que de souffrir le restant de ta vie. J’aime mieux vivre un an comme moi je le veux, que cinquante ans comme la société me voyait. »
« Pour faire une hormono-thérapie, il faut aller consulter un psychologue pendant plusieurs sessions, se faire évaluer. Ça c’est vraiment con by the way, sérieusement s’il y a une chose plus conne que ça, de se faire dire par une autre personne ce qu’on est ou ce qu’on n’est pas… Il faut que tu correspondes à des critères, ensuite cette personne là te donne une lettre pour dire que tu peux recevoir la testostérone – ou les estrogènes –, puis ensuite tu vas voir un endocrinologue, ou un médecin de famille qui va te référer à un endocrinologue. J’ai commencé en août, j’ai rencontré ma psychologue jusqu’en octobre, et en novembre j’ai commencé à avoir mes injections. Personnellement j’ai jamais aimé les aiguilles ; pour te dire, je tombais sans connaissance quand j’en voyais. Mais je suis passé par dessus cette peur pour pouvoir faire ça. C’était vraiment difficile, la première, je shakais… Mais j’étais heureux, je sautais partout, je courrai dans la rue avec mon ami comme ‘Aaah, la vie est tellement hot !’ Les changements arrivent à partir de trois semaines, mais ils sont vraiment minimes. Et à chaque semaine t’as des changements. Je pense que ma transition se passe relativement bien, pour les changements physiques, et pour les changements psychologiques. Par exemple je n’aimais pas ressentir des sentiments extrêmes, et j’étais une personne qui en ressentait beaucoup. Bizarrement avec les injections de testostérone, ça s’est comme effacé. Et sincèrement, d’être moins touché par les blessures que les gens essaient de t’infliger, c’est vraiment nécessaire dans une transition. Et je pense que ça c’est le plus grand changement psychologique que ça m’a fait : je suis devenu un peu plus dur. Le gouvernement provincial requiert une stérilisation pour changer son marqueur de genre sur son certificat de naissance. Demander ça à des gens c’est vraiment difficile. Moi personnellement je prends juste des hormones, parce que pour moi, la patience dans une transition c’est vraiment important. Chaque jour je me pose des questions sur ma transition, je me remet en question, parce que c’est quelque chose qui reste à vie. Je pense que je suis rendu au point où je m’accepte vraiment pour qui je suis. Je pense que je vais faire une chirurgie de mastectomie, une ‘reconstruction de poitrine masculine’ – c’est un terme assez weird. Ça prend autour de six mois pour se faire accepter, mais je ne suis pas pressé, on a toute notre vie pour faire une transition. »
« La société devrait apprendre à ne pas genrer les personnes automatiquement. Quand on va à l’épicerie, se faire dire ‘monsieur’, ‘madame’, c’est pas nécessaire. ‘Bonne journée Monsieur. Bonne journée Madame.’… Bonne journée ça suffit, il n’y a pas besoin d’en rajouter. Et comme ça sans s’en rendre compte on peut sauver des vies. On appelle ça se faire ‘mégenrer’. C’est la chose qui blesse le plus, parce qu’on se demande pourquoi ça nous affecte. On se dit ‘Ben voyons, je devrais m’en foutre complètement, cette personne là je ne vais même pas la revoir.’ Mais ça nous affecte parce que la personne ne nous a pas lu comme nous on se lit. Et là il y a un mind fuck. Je pense que ne pas assumer le genre des personnes quand on les rencontre, leur demander leurs pronoms préférés, c’est très important. C’est dur d’instruire les gens là dessus, mais plus on en parle, moins ça fera de dommages. Ça peut sauver des vies, pour vrai. »
Par Portraits de Montréal
(urbania.ca)