Homophobie/Xénophobie
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Homophobie/Xénophobie
La Russie de Poutine voit dans le mariage homosexuel l'exemple de la dépravation occidentale
La légalisation en France du mariage homosexuel a fait redoubler l'hostilité aux "moeurs étrangères" dans la Russie de Vladimir Poutine, catalysant les sentiments antioccidentaux au profit d'un repli identitaire et isolationniste cultivé par le pouvoir.
"Le vieux monde a semble-t-il fait son choix. (...) Faire le culte de l'homosexualité, renoncer à la notion de péché, trahir le christianisme et la famille traditionnelle, dépraver les enfants dans des familles homosexuelles - tout cela, c'est la destruction de sa propre identité, le chemin de l'autodestruction", a commenté dimanche soir Dmitri Kisseliev, le présentateur de l'émission d'information hebdomadaire la plus regardée de la télévision publique russe.
Les déclarations sarcastiques ou franchement vindicatives se sont multipliées en Russie ces dernières semaines au fil des différentes étapes de la légalisation en France du mariage homosexuel.
Le mariage homosexuel n'est "absolument pas dans les normes, dans les traditions du peuple russe", a tranché samedi la vice-Première ministre Olga Golodets, promettant une adaptation des textes pour empêcher l'adoption d'enfants russes par des couples étrangers homosexuels.
Ajoutée à l'adoption en cours à la Douma (chambre basse du parlement) d'une loi controversée punissant tout acte de "propagande" homosexuelle devant mineurs (déjà appliquée à Saint-Pétersbourg), cette rhétorique a conforté dans la société les sentiments des homophobes les plus radicaux, souligne l'association Sova, une ONG spécialisée dans la lutte contre la xénophobie.
Le Comité d'enquête russe a fait état lundi d'un deuxième cas en trois semaines d'homosexuel battu à mort pour son orientation sexuelle au Kamtchatcka (Extrême-Orient), après un premier cas survenu à Volgograd (sud-ouest).
"Une telle rhétorique est inacceptable, et a des conséquences tragiques", a dénoncé un des chefs de file du mouvement de défense des droits des minorités sexuelles en Russie, Nikolaï Alexeev.
Le terrain est propice en Russie aux discours homophobes - l'homosexualité a été considérée comme un crime depuis l'époque soviétique et jusqu'en 1993, comme une maladie mentale jusqu'en 1999-, soulignent les spécialistes, qui dénoncent la responsabilité du pouvoir politique.
"Le terrain pour une telle mobilisation est toujours prêt, la question est de savoir à quels sentiments les autorités veulent faire appel", a souligné Alexandre Verkhovski, de l'association Sova.
"Tout cela se superpose à la campagne antioccidentale, à l'opposition de nos +valeurs traditionnelles+ à un Occident dépravé. Le but est d'attiser les sentiments antioccidentaux", a ajouté cet expert.
La Russie, dont les relations avec l'Occident ont été ambivalentes depuis la chute du régime soviétique en 1991, a multiplié les déclarations de défiance à l'égard des Occidentaux depuis la vague de contestation de l'hiver 2011-2012 et le retour de Vladimir Poutine au Kremlin il y a un an.
Le pouvoir russe, qui part du postulat que les principes des droits de l'Homme et de la démocratie professés en Occident sont en grande teintés d'hypocrisie, a accusé les Occidentaux de financer opposition et ONG pour faire passer ses vues et ses intérêts stratégiques, et une nouvelle loi impose aux ONG bénéficiant d'un financement extérieur de se présenter comme étant des "agents de l'étranger", une appellation qui renvoie à l'époque stalinienne.
La condamnation à deux ans de prison de membres des Pussy Riot, des jeunes femmes qui avaient chanté en février une "prière punk" contre Vladimir Poutine dans la cathédrale de Moscou pour dénoncer la collusion entre le pouvoir et l'Eglise orthodoxe, dénoncée en Occident, a été le premier point de friction transposé dans la sphère morale et religieuse.
Première cible parmi les Occidentaux, les Etats-Unis se sont vu retirer en décembre par la Douma le droit pour leurs nationaux d'adopter des enfants russes.
La crise syrienne montre, sur le terrain diplomatique, une Russie également isolée face aux Occidentaux auxquels elle oppose farouchement le droit international, tout en fournissant des armes au régime.
Pour Alexandre Morozov, rédacteur en chef du site Russkii Journal, ce processus isolationniste "vient du pouvoir comme de la société".
Le pouvoir s'appuie, face à l'opposition libérale pro-occidentale, sur "une génération de jeunes conservateurs qui voudraient un conflit avec la civilisation occidentale", dit-il.
"La confrontation avec les Occidentaux devient une politique nationale, et la rhétorique homophobe en est une composante", estime-t-il.
(Source AFP)
e-llico.com