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En Russie, un journaliste gay menacé d'expulsion tente de se suicider

Publié le par justin

En Russie, un journaliste gay menacé d'expulsion tente de se suicider

Par décision de justice, les autorités russes ont décidé d’expulser en Ouzbékistan Ali Feruz, journaliste à Novaïa Gazeta. Homosexuel, ce dernier craint de retourner dans un pays où il a déjà été torturé.

Ali Feruz, c’est son nom de plume. Un alias qui témoigne de la difficulté d’exercer le métier de journaliste en Russie. Khoudoberdi Nourmatov, de son vrai nom, était journaliste indépendant pour le journal russe Novaïa Gazeta. C’était avant de se faire arrêter par la police lors d’un contrôle d’identité, le 1er août, et d’être transféré dans un commissariat à Moscou. Présenté à un juge le lendemain, Ali Ferouz tente de s’ouvrir les veines à l’aide d’un stylo à l’annonce de son expulsion vers l’Ouzbékistan. Des huissiers présents lors de l’audience l’empêchent d’aller au bout de son geste.

Depuis mai, et le refus du département de l’immigration russe de lui accorder le statut de réfugié, Ali Feruz est plus que jamais en danger. Tous les recours possibles sont épuisés. Lui, comme sa famille, redoute une expulsion vers l’Ouzbékistan. Et pour cause. Ouvertement gay, militant pour les droits de l’homme et journaliste, Ali Feruz représente tout ce qu’il y a de plus insupportable, dans un pays qui occupe la 169e place sur 180 au classement mondial 2017 de la liberté de la presse, et où l’homosexualité entre hommes est passible de trois ans d’emprisonnement. De nombreux rapports mettent également en exergue un usage généralisé de la torture dans les geôles ouzbèkes.

Première alerte

Une réalité que le journaliste a déjà éprouvée. De nationalité ouzbèke mais né en Russie, Ali Feruz est parti s’installer dans son pays d’origine à la fin de ses études en 2008. Il est alors rapidement approché par les services de sécurité intérieure qui souhaitent qu’il collabore avec eux afin d’obtenir des informations sur les islamistes, première force d’opposition dans le pays. Il refuse, et est alors torturé avant de parvenir à quitter le pays. «Il s’est d’abord installé au Kazakhstan, mais ils l’ont retrouvé. Ils ont même menacé sa femme, à l’époque enceinte», confie Alexander Artemyev, porte-parole d’Amnesty International au bureau de Moscou.

Ali Feruz fuit à nouveau. De retour en Russie en 2011, il attendra trois ans avant de régulariser sa situation. Sa demande d’asile ne lui sera refusée qu’en mai dernier. «La Russie n’accorde que très rarement le statut de réfugié», se désole Alexander Artemyev. Selon le rapport d’Amnesty International, Indice d’acceptation des réfugiés, seuls 33% des Russes sont prêts à accueillir des réfugiés dans leur pays, et 1% seulement se dit prêt à les héberger chez soi. Bien qu’à l’époque, Ali Feruz n’ait pas encore eu de retour sur sa demande d’asile, il est quand même arrêté en mars 2017, les autorités le considérant en infraction au regard de la législation migratoire russe. Il finira par être relâché après quelques jours de détention. Tant qu’aucune décision n’avait été rendue sur son cas, rien ne justifiait légalement qu’il soit retenu.

Une situation plus alarmante

Actuellement dans une prison pour migrants sans papiers à Moscou, le journaliste peut encore faire appel contre la décision prise mercredi par le tribunal ordonnant son expulsion. Il aura alors quelques semaines de répit. «Il a dix jours pour faire appel de sa décision. Il sera ensuite fixé sur son sort à la fin de la procédure d’appel», se rassure Alexander Artemyev. Et de poursuivre : «Il faut maintenant que la mobilisation soit grande pour essayer d’obtenir une décision politique favorable à Ali. Nous avons espoir. L’exécutif russe est imprévisible. Quand on voit qu’après trois ans de prison, Ildar Dadin a finalement été libéré sur décision de la Cour suprême, ça nous donne de l’espoir.»

 

.liberation.fr

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